Hello Fairies!
L’atelier d’hier consistait à poursuivre la phrase suivante:
J'étais en train de marcher dans le parc quand soudain j'entendis une voix s'exclamer : "Vous ici!".
J’ai été plutôt inspirée par la saison, et je me suis prise au jeu!
J’étais en train de marcher dans le parc quand soudain j’entendis une voix s’exclamer:
– Vous ici!
Je me tournai vers l’origine du son, me demandant si l’on s’adressait à moi. Mais il n(y avait personne dans l’allée où je me trouvais. La personne qui s’était exprimée se trouvait de l’autre côté de la rangée de buissons hauts qui séparait les deux chemins de terre. Les branches étaient si serrées que l’on ne distinguait rien de ce qu’il se passait de l’autre côté. J’en déduisis donc que l’injonction ne m’était pas destinée.
Je me rapprochai de la séparation de verdure, intriguée. Quelqu’un avait certainement répondu au premier homme – la voix était définitivement masculine, je pus le confirmer lorsqu’il reprit la parole.
– Ce n’est pas possible. J’ai… J’ai vu… Je t’ai vue…, bégaya-t-il.
Seul un silence pesant lui répondit. Tentant de ne toujours pas divulguer ma présence, je m’avançai encore vers l’intersection pour mieux entendre l’échange. Qui pouvait bien être cet homme qui se promenait aux aurores dans le jardin du musée? Le soleil à peine levé n’atteignait pas encore les allées du labyrinthe feuillu. La brume matinale recouvrait encore ses terres, assourdissant les sons et créant une atmosphère nimbée de mystères. Je ne reconnaissais ainsi pas la voix étouffée du visiteur mais n’osai m’approcher trop près , de peur d’interrompre ce qui ne manquerait pas d’être un moment intéressant.
Cela faisait des années que je me promenais dans ces jardins et j’avais assisté à plus de scènes ici qu’au théâtre. Les gens venaient se perdre quelques heures dans le labyrinthe pour échapper à leur quotidien, à leur réalité. Ils ignoraient qu’ils étaient en réalité là pour faire face à leurs fantômes.
– Que voulez-vous? reprit l’homme.
Je pouvais entendre dans sa voix qu’il s’était redressé, qu’il avait relevé le menton. Il tentait de se montrer brave. Mais le tremblement de sa voix trahissait non plus la surprise mais la peur.
– Que penses-tu que je veuille? lui répondit calmement une voix féminine glaciale.
Je la reconnus. Elle était ici depuis quelques semaines à peine, mais je la croisais souvent le matin. Je connaissais son histoire, qu’elle m’avait racontée quelques jours après son arrivée, une fois le plus gros du choc passé.
Un sourire étira mes lèvres. Sans voir ce qu’il se passait, sans qu’un mot de plus ne soit prononcé, je sentis la peur se changer en terreur tel un puits sans fond qui engloutit ce qui l’entoure dans ses sombres profondeurs, annihilant lumière et espoir au fil de la chute. Mais je ne tombais pas, et ma nouvelle amie non plus. Nous flottions hors du puits. Seul l’homme chutait dans les abysses de sa propre couardise. La brume s’intensifia. Je tournais à l’angle du chemin et me plaçait en retrait derrière la femme qui se tenait dignement fac à l’homme ridicule à genou devant elle.
La lumière continua de baisser. Le froid s’agrippa aux vêtements et l’humidité s’infiltra sous la peau de l’homme, glaçant ses os.
Il ne me remarqua pas. Ses yeux exorbités ne pouvaient se détacher de sa femme. Sa bouche était ouverte sur un cri qui ne franchissait pas sa gorge. Nous ne faisions pourtant rien? Il s’infligeait cette torture seul. Nous avions juste insufflé dans ses rêves, bien trop paisibles, l’idée de venir se promener dans le labyrinthe. Le reste venait de lui.
– Tu sais ce que j’attends de toi, répéta la femme, dans un chuchotement à peine perceptible.
alors l’homme perdit le contrôle de sa vessie, mais reprit celui de ses muscles. L’entrejambe de son pantalon trempée, il se précipita vers la sortie du parc. Désorienté, perdu, paniqué, il couru pendant plus d’une heure. J’entendais parfois un hurlement strident lui échapper. Il devait tourner en rond et retomber sur elle. Je m’amusais de le voir ainsi souffrir.
Enfin il parvint à quitter les jardins. Le soleil le recouvrit, mais rien ne parvint à le réchauffer. La peur s’accrochait à son âme. Il fit donc ce qu’elle attendait de lui : il confessa son crime. Il finirait sa vie en prison pour le meurtre prémédité de sa femme. Elle avait obtenu justice.
Je la rejoignis dans l’allée principale qui avait retrouvé son éclat et ses vives couleurs automnales. La paix se lisait sur son visage alors je la guidais vers le centre du labyrinthe. au cœur du parc, une lumière pure l’attendait. Dans un merveilleux sourire plein de chaleur, elle me fit ses adieux. Elle était en paix, libérée.
Pour ma part, soulagée, je continuais mes errances. Je les continuerai encore pendant des siècles. comme je le faisais depuis tout autant de temps. Je continuerai d’errer dans ces jardins tant que des femmes bafouées auront besoin d’aide pour trouver le repos avoir subi la mort sous la main d’un homme.
Cette charge était souvent lourde à porter, la mission dure à réaliser, le nombre de ces femmes semblait ne jamais vouloir diminuer, mais je n’étais pas fatiguée. Après tout, comment peut-on l’être quand on a l’éternité pour se reposer?
Alors je reste, je guide ces femmes victimes de féminicides. Elles n’obtiennent pas toujours justice, ni la paix, mais j’essaye. Certaines restent avec moi car elles ne parviennent pas à accepter. alors nous aidons les autres. Même dans la mort, la sororité.
Voilà pour cette fois!
Bonne lecture et bonne écriture!
Xoxo!
Un commentaire sur « A line a day – Vous ici! »